trade the shade for somethin' warmer (liam)

Jour important. Qui pourrait la rapprocher un peu plus de son objectif. Un contact donné. Une rencontre inespérée. Et puis, un rendez-vous. Pensée douce amère pour Alex. Aurait-il été fier ? Sûrement. S’il avait été là, il lui aurait dispensé quelques paroles encourageantes, bienveillantes. Sauf qu'il n’est plus là, Alex. Alors, il n’y a pas de paroles encourageantes ou bienveillantes. Il n’y a que Marci et ses pensées. Marci et ses ambitions. Prête à tout pour intégrer les rangs de la police new-yorkaise. Au point de payer un coach sportif, sans forcément en avoir les moyens. Il faut ce qu’il faut. Surtout après toutes ces années passées sur les bancs de l’université. À muscler son cerveau plutôt que le reste de son corps. Remise en forme obligatoire afin de mettre toutes les chances de son côté. Parce qu’elle doit y arriver, Marci. Pas d’autre option envisageable. Elle doit intégrer l’académie de police. Si avant, elle espérait pouvoir protéger son frère et les mutants avec ses plaidoiries, la méthode a changé. Cette fois, elle défendra avec l’arme à la ceinture et l’uniforme. Autre ambiance. Autre investissement personnel. Davantage l’impression d’avoir un rôle à jouer, une influence sur le monde. Peut-être qu’elle se trompe. Peut-être qu’elle reviendra à ses études de Droit dans quelques mois. Peut-être. En attendant, elle essaye. Elle poursuit la voie qui lui semble la plus indiquée. Celle qui correspond à sa combativité, à sa motivation du moment. Alors, ce sera la police et rien d’autre.

Première étape : se rendre au rendez-vous. Il a lieu dans un café choisi sans aucun hasard. Celui où elle avait ses habitudes, à une époque. Il abrite de jolis souvenirs. Aujourd’hui, il sera aussi le décor d’un nouveau changement. Elle adresse un sourire aux employés. Visages familiers, rassurants. Elle connaît les prénoms, les habitudes, les passe-temps. Elle sait que certains ne resteront pas. Ils sont seulement de passage, le temps de trouver mieux. De finir des études entamées. De compléter un premier salaire pas assez important. Ils ont tous une raison d’être là. Rarement par passion. Marci s’installe à l’une des tables. Une qui lui donne une vue sur la porte du café. À peine installée, les prunelles glissent sur le côté. Vers cette table. Une boule se forme au creux de son ventre. Bouleversement des tripes. Mémoire douloureuse. Elle n’aurait pas dû choisir cet endroit. Elle pensait être prête à y revenir. Elle se trompait. Le deuil est encore en cours. Bien ancré dans sa chair. Incapable de la laisser respirer. Un employé s’approche, paré à prendre sa commande. L’occasion de l’arracher à la vague émotionnelle qui la noie. Articuler “un café latte, s’il te plaît” est plus dur que prévu. Elle y parvient toutefois. Lorsque la boisson est servie, Marci se perd. Laisse les pensées surgir, divaguer. Le doigt glisse le long de la tasse. Fait le tour du récipient. Se laisse réchauffer par la chaleur de la boisson. Totalement aux prises à son passé. Jusqu’à ce qu’une silhouette massive apparaisse dans son champ de vision. Là, Marci se redresse. Réveillée par l’apparition.

Impossible de louper la machine faite de chair et d’os qui s’avance vers elle. Si elle avait eu ne serait-ce qu’une inquiétude de ne pas reconnaître Liam, elle viendrait de s'évaporer face à son apparition. Cependant, elle ne doute pas, Marci. Bonne mémoire des visages. Même ceux aperçus quelques minutes, à l’entrée d’un établissement, le tout de nuit. Probablement une qualité qu’elle saura utiliser dans sa future carrière. Pour l’heure, ça lui sert tout juste à se lever quand Liam arrive à la table. À tendre la main, un sourire accroché aux lèvres. Il est son salut, la solution pour atteindre son but. “Bonjour ! Contente de vous revoir…” Elle s’interrompt dans sa phrase. Le visage chiffonné par une grimace. Le vouvoiement, c’est compliqué. D’autant que s’ils se mettent d’accord sur un programme, ils vont se voir régulièrement. “On peut peut-être se tutoyer, non ?” Elle ne demande pas grand-chose, Marci. Seulement tutoyer la personne qui s’apprête à la torturer avec son consentement. Rien de plus, au final. “Tu veux boire quelque chose ? Ils font un super cappuccino. D’ailleurs, ils torréfient eux-mêmes leurs graines de café.” Non pas que cela soit un argument quelconque. En tout cas, pour des gens non-passionnés par la caféine. Alex l’était, lui. Encore. C’est pour cela qu’ils allaient ici régulièrement. Il l’avait désigné comme le meilleur café de tout New-York. Modestement.