Le succès fut toujours un enfant de l'audace. [Fe]

La réunion avec les collaborateurs touche à sa fin. En digne chef d'orchestre, Edward a flatté certains egos, calmé d'autres pour que tous s'entendent sur les points du jour. Il n'en est pas peu fier, un sourire satisfait sur les lèvres, il serre les mains et raccompagne les individus jusqu'à la porte de sortie pour les laisser croire qu'ils ont de l'importance et que l'avantage est plus du côté de ces derniers que de lui-même. Il y est parvenu et rien ne le mets plus de bonne humeur qu'un mécanisme parfaitement rodé qui fonctionne sans petit grain de sable pour lui faire perdre son temps. Il s'accorde une petite pause avant un prochain rendez-vous. Il passe devant le bureau de son assistante sur le chemin du retour et se plante devant elle. Sa présence ne suffit pas à lui faire relever le nez de son ordinateur. La vitesse à laquelle elle tapait sur son clavier indique qu'elle est focalisée sur sa rédaction. Il racle sa gorge pour indiquer sa présence et le bruit s'arrête brutalement. Elle relève la tête.

‟ Monsieur Trask…je ne vous avais pas entendue pardonner moi. J'étais…” Elle s'arrête brusquement avant d'en dire trop. Se confondre en excuse et en justificatif est inutile, elle le sait, mais c'est plus fort qu'elle. ‟ Que désirez-vous?”

‟ Je veux un café sur mon bureau dans cinq minutes.” Ordonne-t-il sans fioriture avant de disparaître dans son bureau. Il n'a pas besoin d'ajouter d'autres directives. Depuis le temps qu'elle travaille ici, elle sait parfaitement ce qu'il veut. Edward Trask n'est pas un homme qui change ses habitudes sur ce genre de choses. Un expresso, noir et corsé.


Il retourne dans son bureau et observe un instant les dossiers à la droite de son ordinateur. Des dossiers qui requièrent sa validation. Dernières directives avant la mise sur le marché d'équipements pour contrôler ou se protéger les mutants. Des bracelets comme le sien, des colliers moins voyant. Un rapport sur un prototype de gilet pour les persécuteurs. Cinq minutes, après être rentré dans son bureau, on toque à la porte. Il signal à sa secrétaire d'entrer et tout en posant la tasse sur un dessous de verre, elle se recule et reste droite, hésitante.

‟M…Monsieur…j'ai prévenu la demoiselle…non…Hummm…” Il serre l'arête de son nez. Mathilda est une bonne secrétaire, mais elle n'a pas encore assez de confiance en elle pour s'adresser clairement et précisément à Edward.

‟Reprenez-vous et allez droit au but, combien de fois devrais-je vous le demander ?”

Elle prend une grande respiration, compte sur ses doigts et reprend.

‟ Une demoiselle est là pour un entretien, Mademoiselle Davenport, elle a dit vouloir vous parler directement. Je lui donne un rendez-vous ou je la fais patienter ?”
‟ Je ne fais pas de recrutement Mathilda, La DRH est là pour ça.” Il soupire ‟ Puisqu'elle est devant la porte faites la entrer, ne me faites pas perdre plus de temps.”

Mathilda disparaît derrière la porte, frappe à nouveau et cette fois-ci, c'est une autre qui entre. Edward ne prend pas la peine de se lever. Le regard nonchalant de la jeune fille croise le sien. Il se lève enfin, fait le tour de son bureau et empoigne la main de la jeune fille pour connaître sa vigueur.

‟ Mademoiselle Davenport. Vous semblez avoir de l'audace. Je vais donc vous laisser une chance. Je vous laisse quinze minutes pour me convaincre. Vous pouvez prendre place. A quel poste voulez vous postuler?”

‟  Edward Trask, me présenter n'est qu'une formalité puisque vous devez déjà savoir qui je suis.” Edward considère la colombe. Lui propose de prendre place dans un des fauteuils face au bureau. Il épie chaque geste qu'elle produit. Yeux affûtés. Costard ajusté. Ce n'est pas tout le monde qui se présente ainsi à sa porte. Littéralement. Il observe la posture, sa tenue pendant qu'elle commence à disserter. Il va devoir la façonner. Il prend quelques notes rapides sur une feuille. Observations qui ressemblent à des symboles dont lui seul à le code. Technicienne de surface ou secrétaire. Elle n'est pas précise dans sa demande, elle semble prompte à accepter ce qu'on veut bien lui proposer. Jusqu’où peut-elle s'investir ? Il guette la faille, il y en a forcément. Argile encore immaculée, prête à être façonnée à l'image de Trask. Prêtre à boire toutes les exigences ? Il n'aime pas perdre de temps.

A quel point peut-elle être fiable? Tout en gardant le stylo dans la main, il reporte son regard sur elle. Son lagunage est familier, naturel. Il réfléchit toute en l'écoutant. Elle met un terme à sa présentation et de ce qu'elle peut apporter. Elle peut être bien plus. Elle est d'une jeunesse qui semble malléable. Familière à première vue, mais une amélioration  est possible. Mathilda doit avoir son prénom en mémoire, il ne lui semble pas avoir entendu le sien. Edward se penche vers la jeune Davenport. Touche son ego et son amour pour l'efficacité de ses salariés. Il estime chaque mot qu'elle prononce, chaque respiration qu'elle prends. Tout est important dans l'analyse de cette jeune femme. Le regard plongé dans celui de AJ, Edward attends, assis dans son fauteuil, les mains en évidences.

‟ Trask est une entreprise de Haute Technologie, bien évidemment, vous devez le savoir, nos produits servent à améliorer la sécurité de tout un chacun. Mutants comme non-mutants.” Précise-t-il.‟ L'image de l'entreprise est aussi importante que celle des employés. En-dehors comme à l’intérieur des locaux.” Il se gratte la joue.  ‟Le temps de mes employés est optimisé afin qu'ils soient efficaces. C'est un rouage précis et minutieux.” Il s'assure qu'elle ai bien compris avant d’enchaîner. ‟ Un.e secrétaire porte l'image de l'entreprise. Pensez-vous être à la hauteur de nos exigences ? Vous devriez être plus précise. J'aime votre audace, mais vous manquez d'ambition.” Il observe la réaction de la brune. ‟Vous prendre serait un pari osé. Je ne suis pas très joueur.”

Il marque une pause pour voir sa réaction. ‟ Toutefois, vous êtes jeune, vous pouvez apprendre et vous améliorer. Parlez moi de vous. Ce que vous aimez, ce que vous savez faire. Votre rêve. Avez-vous un rêve mademoiselle Davenport? Quelque chose qui vous pousse à vous dépasser ? Quelque chose qui compte pour vous ?”

Quelque chose qui puisse vous retenir si vous faites un faux pas? Voilà ce qu'il voulait savoir. Connaître ses ambitions pour évaluer sa fiabilité autant que pour trouver quelque chose qui pourrait lui aller. Il pose son crayon soigneusement et tourne son corps entier vers elle. Elle n'est peut-être pas dupe. Elle n'est peut-être pas faite pour travailler pour lui dans ce cas. L'entreprise est importante aux yeux d'Edward, il ne prendrait aucun risque si elle devait être totalement anarchique et incontrôlable.